La Princess' plus camion que carrosse qui préfère la fée Carabosse.

samedi 12 juillet 2014

Etres femmes #3

J. Howard Miller. 1943
Dernier volet de mes pérégrinations, un répertoire non exhaustif des blogs écrits par de féminines plumes bien trempées, pertinentes et impertinentes. Elles ne se contentent pas de dénoncer et de traquer la pub sexiste, le propos macho, et toutes les violences faites aux femmes. Elles sont militantes et engagées, sérieuses et professionnelles, drôles et graves, intelligentes et décapantes, audacieuses et talentueuses et font bouger les lignes. Elles écrivent comme elles respirent, ne manquent pas d'air, pensent haut et clair, et causent pareil, tambour battant. Journalistes, écrivains, blogueuses, à découvert ou cachées derrière un pseudo, elles occupent le terrain 2.0 et plaident pour la parité, la parole donnée aux femmes, dans des domaines réservés à la seule expertise masculine comme la politique, l'économie ou le sport.
Il y a peu, j'ai vu une publicité à la télévision assez stupéfiante. Il s'agissait de vendre un canapé, et la marque Cuir Center n'a pas lésiné sur le cynisme. Pour vanter la qualité dudit mobilier, 3 hyènes s'ébattent sur le cuir blanc des coussins, se vautrent de plaisir et ricanent. Intriguée par ce choix singulier, dans l'imaginaire collectif cet animal n'est pas franchement attirant, perçu avant tout comme une bête disgracieuse, agressive et hurlante, se nourrissant de charognes et d'ordures, j'ai eu à peine le temps de m'interroger sur le sens obscur de la mise en relation du prédateur de la savane avec un canapé élégant (les coussins allaient-ils résister aux mâchoires de la bête affamée, réputée pour sa voracité et démontrer une solidité à tout épreuve ? Le cuir blanc révèlerait-il davantage sa délicatesse et sa douceur, comparé aussi subtilement à la sauvagerie de l'animal ?) que la révélation sur le sens du message ne se fit pas attendre. Dans le plan suivant, les 3 hyènes s'étaient transformées en 3 jeunes femmes assises sur le canapé, leur belle apparence contrariée par leurs ricanements, leur complicité féminine caricaturée en sabbat déchaîné de bêtes hurlantes.
Décidément, depuis la publicité Orangina, qui compare systématiquement la femme à une girafe, une chèvre ou un poulpe, la référence animale pour évoquer la femme est une source d'inspiration inépuisable pour les créatifs. Des petits malins, et plus surprenant des petites malignes, ont tenté de ridiculiser encore davantage les femmes choquées par la publicité du fameux canapé avec leurs commentaires sur les blogs qui dénonçaient le sexisme des images. Elles ignorent, ces crétines absolues et rabat-joie totalement dépourvues d'humour de surcroit, que la hyène est un animal méconnu qui ne mérite pas sa mauvaise réputation. La femelle domine le mâle, par sa taille et son poids, et vit dans une harde dont l'organisation matriarcale laisse au sexe opposé une place négligeable. Le volume de ses organes génitaux est suffisamment conséquent pour en imposer, et elle est capable de se délecter d'autre chose que de pourriture, sa dentition carnassière lui permettant de déchiqueter aussi de la barbaque fraîche. Pour finir, son hurlement hystérique ressemble davantage à un rire, contagieux qui plus est. Je suis conquise par ces révélations, et honteuse de mon ignorance, je sacre définitivement la hyène tachetée pionnière et citoyenne modèle d'une société idéale que j'appelle de mes vœux. Une société qui remplacerait la domination masculine par celle des femmes, la longueur du pénis concurrencée par l'hypertrophie du vagin ! J'ai toujours rêvé, comme la majorité des femmes, d'être pourvue d'une vulve proéminente comme une noix de coco, et d'arracher avec les dents des lambeaux de salami putréfié, ricanant atrocement, les babines retroussées, dans un monde où les hommes seraient réduits en esclavage, voire dévorés, tout frais zigouillés ou largement faisandés. Je suis reconnaissante aux publicitaires de rendre hommage aux hyènes et aux femmes, de réhabiliter dignement leur condition commune, et avec un humour sublime, de lier la féminité à la sauvagerie animale. Le message publicitaire est limpide, les hyènes femelles devraient être séduites par le canapé Cuir Center parfaitement adapté aux papotages dans la savane entre copines, mais seront-elles flattées par la comparaison audacieuse avec les femmes, et la marque a-t-elle réellement touché sa cible, la hyène trentenaire, moderne, fière de sa décoration d'intérieur, élégante et confortable ? Je serais navrée pour Cuir Center si les hyènes boudaient le fleuron de leur collection, un canapé pourtant spécialement destiné aux charognardes hystériques, à cause d'une comparaison dont la pertinence et la subtilité leur aurait échappé.


Je reviens à mes plumitives du web. Isabelle Germain est journaliste, plus spécialisée dans la presse économique et l'info générale, et a collaboré à l'Express, Le Monde, Psychologies magasine, Marianne... Elle a créé le site les Nouvelles News,  « de l'actu avec 50% de femmes dedans », une info différente qui donne la parole aux femmes à part égale avec les hommes, pour une vision plus juste et plus complète de la démocratie. Dans l'équipe, Natacha Henry, journaliste et historienne, fondatrice de Gender Company, site sur lequel elle lutte contre le sexisme dans la culture et les médias et contre les violences sur tous les fronts, conjugal, sexuel, professionnel.
Sophie Gourion s'affiche sur son site Tout à l'ego comme rédactrice et journaliste du web ( Slate, Rue89, Auféminin.com, L'Express Styles...) et se définit avec humour comme  « brune sans filtre, féministe à talons. 1m77 de contradictions. Mère calme à agitée qui a perdu le mode d'emploi de ses gosses ».  Elle décape les publicités sexistes, et zoome sur les créatrices d'entreprises innovantes, histoire de changer les mentalités et la vision d'un féminisme revanchard et daté.
Myriam Levain œuvre avec deux copines pas potiches sur Cheek Magasine  et c'est passionnant, et sur Les Martiennes (parce que toutes les femmes ne viennent pas de Vénus) et c'est toujours passionnant. Extrait :  « Les martiennes sont ces femmes qui ne se résument pas à l’émotion et la douceur, et qui se réalisent avant tout dans le pouvoir et l’action, pour être indépendantes, affranchies des stéréotypes et des attentes que la société porte sur elles ».  Maïa Mazaurette est écrivain, auteur de bandes dessinées, chroniqueuse, et son sujet de prédilection à elle, c'est la sexualité, comme son blog l'indique sans détours, Sexactu.
Claire Alet a créé en mars 2014, avec 25 journalistes, le collectif Prenons la Une, avec une déclaration manifeste comme étendard. Aperçu :
« Nous, femmes journalistes, dénonçons la trop grande invisibilité des femmes dans les médias. Dans les émissions de débat et les colonnes des journaux, les femmes ne représentent que 18% des experts invités. Les autres femmes interviewées sont trop souvent présentées comme de simples témoins ou victimes, sans leur nom de famille ni leur profession.
Nous, femmes journalistes, ne supportons plus les clichés sexistes qui s'étalent sur les unes. Pourquoi réduire encore si souvent les femmes à des objets sexuels, des ménagères ou des hystériques ?
Par ces déséquilibres, les médias participent à la diffusion de stéréotypes sexistes. Or ils devraient à l'inverse représenter la société dans toutes ses composantes. Ces stéréotypes sont à la fois la cause et le résultat des inégalités professionnelles, des propos et attitudes sexistes au sein des rédactions, mais aussi du manque de sensibilisation des journalistes à ces sujets ».
Et puis aussi Marie Donzel et son site Ladies&Gentlemen, « chèfe d'entreprise et auteure » qui promeut « l'égalité des sexes au cœur de l'actualité », et puis d'autres, la miroitante Myroie qui reflète les inégalités de la société et qui remet en question d'abord ses propres certitudes sur Egalitariste, le site A Contrario, avec « de vraies chroniques élevées en liberté », Les Déchaînées, 6 mal pensantes dérangées, Valérie sur Crêpe Georgette, crépeuse de chignon invétérée, Anaïs' Misfits,  « anti miso-boulot-dodo », Daria Marx« la seule adresse à écrire en gras », rédactrice rondelette qui assassine les poivrons pour se calmer les nerfs... il y en a tellement, Melissa Bounoua la Misspress, Peggy Sastre, Mona Chollet... un festival d'agitées du bocal qui pensent la société autrement et donnent du féminisme une image aux mille facettes.
Allez, zou... les petites dernières, elles chantent. La P. O. U. F (Petite Organisation Ultra Féminine) ou 3 chanteuses foldingues qui se moquent des clichés de la pouffitude. Hard Pouf est une grande rousse flamboyante et tatouée, plutôt cuir et léopard, Aéro Pouf une nunuche acidulée adepte du stretching en collants roses, et Diva Pouf, la bourgeoise BCBG. Humour et kitscherie, poésie et tendresse en prime.
Et celle qui porte un prénom impossible, GiedRé (patronyme Barauskaité), la faute à ses origines lituaniennes, petite blondinette, sainte nitouche minaudante, affublée de robes improbables en vichy rose festonnées de dentelle, qui déverse d'une voix douce des abominations réjouissantes sur la pédophilie, la prostitution, la zoophilie et la scatologie, qui fait des petits ronds avec les doigts parce qu'un anus c'est mieux qu'un cœur pour parler d'amour, et qui préfère les colliers de jolis étrons plutôt que les perles de culture.





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